Concours Octobre 2013

  • Auteur de la discussion Byabya Noblish
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Narrateur (pensif)*: «*C'est vraiment une sale journée … voilà trois jours que le vin est aigre et les plaisirs du corps insipides. Les champs sont devenus arides, le soleil plus brûlant que le fer rouge. La maladie commence à toucher les serviteurs et les pauvres gentes de la haute population. Il n'y a finalement pire enfer que ce qui nous arrive depuis trois jours. C'est vraiment une sale journée …*»

C'était un homme dans la grandeur du bel âge, ayant connu près de vingt fauches de blé. Il était grand et élégant, ses cheveux noirs de jais ressortaient tel l'écrin du plus racé des étalons et son intelligence avait su dès son plus jeune âge, lui attirer convoitise et respect. Il était le fils aîné issu de la troisième génération de la grande et luxurieuse famille des Kos. La famille Kos, vénérant chacun des divins pour ce qu'ils avaient à lui offrir avait su tirer parti de sa position dans l’avènement de la république athénienne et son rôle dans la Grèce unifiée. Or, c'est à ce moment même que moi, Hippolyte Kos, fils de Ionos lui même fils du fondateur de la famille Kos, avait regretté infiniment la position de ma famille alors que celle-ci me menait face à l'impensable.
Le divin des divins, le Dieu parricide tueur des titans, l'allié des milles bras, s'était retrouvé devant moi, d'une hauteur dépassant les toits, et de sa toute puissance alla vers moi quémander une requête de la plus haute importance*;

- «*Ô toi le mortel dont le nom est parvenu jusqu'à mes oreilles, qui de par mes pairs est venu tâter de ma curiosité. Ô toi fils des hommes auquel par le passé, je t'ai fait promettre amour et prospérité. Ô toi le mortel qui par ces instants funestes, bois à travers mes lèvres la peine qui est la mienne. Il n'est pire tragédie à travers tous les âges que celle qui conduit les immortels à commettre l'impensable*; l'acte qui par sa faute, fait couler le sang de ses frères. Ô toi le mortel qui par déjà cinq fois, me fait ouvrir et fermer mes phrases par la grâce qui est la mienne, accepte ma requête sans tarder.*»

C'était vraiment une sale journée, de ce genre de journée qui commence par un quelque chose des plus inattendus et qui se termine par la vision sanguinolente d'une divinité gisant dans son sang, le visage arraché et le corps plus mutilé que s'il était passé entre chacune des dents de chacune des têtes du chien gardien de l'autre monde. Je ne pouvais d'ailleurs guère définir si d'attributs d'homme ou de femme la victime avait été pourvues. Je vomis. Je tomba à terre mais mon genoux frappa si fort le sol que la douleur m'empêcha de tourner de l’œil.
Le corps était immense, plus de quatre mètres. Le sang était noir, séché sous ce soleil de plomb qui à travers même le voile de la nuit, avait toujours su nous imposer son étouffante chaleur, trois jours durant. C'était la scène la plus horrible que je pusse voir de toute mon existence terrestre et sans nul doute sous-terrestre (la famille Kos avait toujours préféré croire à l'existence du royaume au delà du Styx plutôt qu'aux thèses pythagoriciennes de l'absolu Rien après la mort de la chair et du corps).

Il était temps que je me ressaisisse. Zeus lui-même m'avait destiné à cette quête des plus horribles et lui dont la colère en a fait sa célébrité, n'aurait sûrement pas la patience de me voir échouer devant le corps déchiré de l'un de siens. Mais qui avait donc pu commettre un tel acte*? Aucun sortilège ou arme des hommes n'aurait su faire subir un tel supplice à une victime, encore moins divine. Seul un être du même sang et de la même viande que ceux du corps sans vie devant moi aurait pu s'adonner à un tel carnage.
En effet, si Zeus avait choisi un mortel pour mener l'enquête, c'était pour nulle autre raison que les soupçons se portaient à même les habitants du Mont Olympe, les dieux pour lesquels chaque lune, je sacrifiais bétails, présents, vins et prières bienfaisantes. Mais quelle colère pouvait mener à un tel acte*? Pourquoi ce désir de rendre à ce point le corps méconnaissable*? Il fallait que je m'approche dans cette mare de sang dur et poussiéreux. J'avançais à pas hésitant, dans un silence que seuls les brindilles craquelantes de vignes et d'oliviers séchés venaient à rompre. Ce décor macabre n'avait rien de plus et de moins apparenté aux beaux paysages de notre terre mère. Et même dans les coins les plus reculés de sparte on n'aurait vu milieu plus dénué d'espoir. J'arrivais enfin aux abords du corps.

- «*Méconnaissable*!*» m'écriais-je. «*Ce corps est tout bonnement méconnaissable. Les dieux ont perdu la tête et lui n'était pas loin de vraiment perdre la sienne. Cruel fut ton sort et ta destiné car je n'ai pas le moindre nom pour te nommer à travers toute ta défunte dignité. Mais s'il y a une certitude, c'est que tous ces tourments qui nous frappent depuis trois jours maintenant, te sont intimement liés et je le prouverai. Les dieux se morfondent de remords, de peur et de regrets. Ils en perdent les fondamentaux qui en faisaient leur grandeur et tout se dérègle. Ton assassin était-il seul*? Qui donc se morfond dans le secret et la peur d'une vérité qui pourrait être dévoilée*? Ils ont tous disparus, se sont tous cachés, terrés au fond de leur cachette protégée, de telle sorte qu'il est impossible même pour le puissant Zeus de définir qui se cache à travers ton corps victimisé.*»

Cependant, un savoureux jeu d'énigme pourrais m'aider à démêler le vrai. En effet, Zeus durant trois jours, avait laissé éclater sa colère envers ses pairs, ordonnant à chacun de faire acte de présence devant lui. Seul huit d'entre eux ne répondirent pas par leur présence à son appelle qui avait pourtant traversé le ciel et balayé les mers sous la forme d'éclairs et de siphons qu'il ne fut jamais donné de voir, même d’œil d'immortel. Sur ces huit, parvinrent à Zeus sept tirades d'excuses anonymes se présentant chacune de manière différente. Ces sept excuses me permettraient, non seulement de connaître l'identité des auteurs -et notamment de définir l'identité de celui à qui appartient le sang dans lequel je suis stationné en charge, car seule la victime n'avait pu envoyer de quoi s'excuser- mais aussi de définir le coupable. En effet, dans chacune de ces excuses se trouvait la vérité révélée sur ce qui s'était passé. Il ne me restait donc plus qu'à lire à travers les codes. Le corps empestait et je dus m'écarter ainsi que reprendre mon souffle pendant un long moment.

Les huit absents étaient*: Dionysos, Aphrodite, Déméter, Hélios, Apollon, Héra, Ares et Héphaïstos.

Je m'en allais donc examiner chacun des messages.

Le premier se présentait de tel sorte qu'il me fut facile d'en connaître l'expéditeur et ici, plus précisément l'expéditrice. C'était un rosier comme on n'en trouvait pas en terre en royaume de feu Egée, père du grand Thésée. Ce rosier était fleurissant et empli de vie malgré l'ambiance de mort qui régnait ici. Chaque fleur éclatait de mille et une couleurs plus nouvelles à mes yeux les unes que les autres. De celles-ci sortait un parfum qui traversa chacun de mes organes et jamais je ne me souvins avoir verge plus dure et désireuse qu'en cet instant. Chacune des fleurs était inclinée vers l'avant, dans la même direction, légèrement vers le sol en signe de révérence et d'excuse. Celui-ci ne pouvait provenir de personne d'autre que la belle Aphrodite, fille de Zeus née d'un coquillage en bordure de plage.
Le second était un peu plus complexe mais pas impossible à déchiffrer. A première vu, il était difficile de croire que deux colombes à la blancheur immaculée et maintenant, couvertes de sang et tripes à l'air fut un message d'excuse quel qu'il soit. Or c'était sans compter sur les qualités divinatoires des dieux immortels dont un en particulier, lisant dans les entrailles. Tout aussi beau que ces colombes, le dieu Apollon était connu pour délivrer à travers la course du soleil, la santé et surtout, les desseins que nous réservait l'avenir. Les deux colombes laissaient transparaître un air peiné d'une tristesse qui me parut infinie. Dans le ventre d'une d'entre elle, se tenait un œuf, brisé.
Le troisième prenait la forme de douze tiges d'un blé fin et doré, lacé en bouquet. Lors que je pris le bouquet en main, celui-ci devint tout autre, comme ci une autre vérité venait d’apparaître. Chacune des douze tiges prirent la forme successivement d'un blé jeune et immature à un blé de plus en plus fort et brillant jusqu'à un blé fade et pourrissant. Le message de la déesse Déméter ne put me paraître plus clair qu'en cet instant.

La chaleur me brûla les yeux et la gorge, mes paupières étaient de feu et ce fut comme si l'odeur putride du cadavre me harcelait. Je devais à nouveau m'éloigner pour me reposer à l'ombre d'une tente improvisée de quelques tissus superposés. Au moins dans cet univers sans vie, je ne craignais d'y retrouver ni scorpion, ni serpent. D'une rasade vivement giclée, je me rinça le gosier et pu enfin me désaltérer. Cet histoire me faisait tourner les méninges comme jamais et plus que tout, le doute m'assaillais. Il était temps de reprendre l'investigation.

Le quatrième message fut un bâton entaillé à divers endroits de sa surface et planté dans la roche. J'eus beau tirer dessus, tenter de le décrocher et même de le briser, il n'en fut rien, pas un seul tressaillement. La colère et la frustration de ne pas découvrir l'auteur de ce message alimentaient mon désarroi. De rage, je frappa à la base du bâton et dans un cri de souffrance, retira mon pied dont le gros orteil était ensanglanté. En effet, le bâton n'était autre qu'une lance dont seul un infime bout de la lame ressortait encore de la roche dans laquelle elle avait été plantée avec force. Cette lance qui semblait avoir traversé maintes batailles sans jamais céder et à présent plant tel le combattant résigné, ne pouvait être une meilleur preuve de l'origine de son auteur, transcendant la vitalité encore animée du puissant Ares, dieu de la guerre. Entourant mon orteil dans un linceul de linge, je repris.
Le cinquième message tenait dans le creux de ma main. Deux alliances entremêlées, faites d'or d'une infime pureté, laissaient briller sous les rayons du soleil un message gravé en l'un et en l'autre de chacun des deux anneaux. Sur l'un on pouvait lire «*jamais ne trompe, jamais ne ment*» et sur l'autre suivait «*toujours pardonne, toujours servante*». Un tel signe d'amour entrecroisé d'une telle richesse me laissait penser que seule la femme de l'unique roi des dieux, la déesse Héra en personne, avait pu envoyer un tel présent. Il était impossible de séparer les deux alliances.
Le sixième était une lettre, où il est était écrit «*Zeus est puissant*». Elle était bien sale et l'écriture était plus maladroite que celle d'un enfant. Rapprochant la lettre de mon visage afin de mieux la décortiquer, une odeur de souffre et de brûlé, plus forte que l'odeur pestilentielle qui embaumait l'atmosphère, me pris au nez. «*Ainsi, il semblerait qu'Héphaistos sache manier aussi bien la plume et la diplomatie que moi serait expert à manier ses forges...*» me moquais-je, me laissant aller à une ironie cinglante et volontairement méprisante, la fatigue faisant, avant de regretter amèrement mes paroles ainsi hautes exprimées, de peur que de ce blasphème, une punition me soit infligée.

Il ne me restait plus que deux suspects, dont l'un des deux se trouvait, pourri, devant moi. Où bien le mort n'était autre que Dionysos, le dieu festif et joyeux où bien n'était-il autre qu'Hélios, la divinité à l'égale même du soleil, qui de sa hauteur, vous accable de son ouïe et de son œil.
L'heure avait déjà beaucoup avancé depuis le début de l'enquête et bien que mon corps réclamait sans doute quelques pitances, il m'était impossible d'avaler une quelconque nourriture. Ma bouche était sèche, les suées intenses et un frisson traversait ma nuque comme un éclair glacé. Le septième message ne m'incita pas plus aux plaisirs de la dégustation. Il s'annonçait sous la forme d'un chant mortuaire, tel un requiem, qui s'élance et se stoppe aussi tôt, puis reprend avant de interrompre à nouveau

«*Dieu des dieux, mon père, pardonne notre faute ~#♪~☻
Car la lance de la colère a fait bien des …
(interruption)*».


«*De nos deux suspects restant, je crois qu'un seul peut se vanter d'appeler «*père*» le dieu des dieux. Car Hélios s'apparente plus titanesque que divin. Ainsi, cruel est donc le destin des tiens et qui fut ton châtiment. Adieu Hélios, ta perspicacité ne gênera plus jamais les secrets de ceux qui ont fait tant d'efforts pour te les cacher. Mais sois rassuré car Dionysos, par son dernier message et grâce à l'aide des autres, vient de m'aider à résoudre la clef du mystère... Ainsi, Ares puissant dieu, n'a-tu jamais pu pardonner à celui qui voit et entend tous d'avoir révélé à notre dieu à tous, Zeus, ton amour caché avec la déesse de la beauté. L'as-tu dévisagé et éviscéré à l'aide de cette lance*? Cette lance plantée dans la roche, cette même roche que l'on retrouve sur l'île où Héphaïstos retenait prisonnière sa femme, celle de tes désirs. N'était-il autre arrangement pour retrouver entre vous la paix que de prendre le dernier souffle du compagnon qui paya l'erreur de son honnêteté*?*»

Mon orteil me lançait et je sentais la fièvre fulgurante me prendre à mon tour. Mon sang, incapable de coaguler malgré le linceul, se mêlait à présent à celui d'Hélios, le dieu mort sans once de dignité.

«*Ainsi ta lance était aussi empoisonnée que l'était ton esprit, car telle la colère d'Héra mêlée à la Tristesse de Déméter à la perte de sa fille l'hiver venant, tu ne pus faire fi du passé. Ton ennemi, empoisonné après le premier coup porté, ne pouvait plus se défendre et se défaire fasse à ton aveuglément insouciant. De ce fait, tu as fait de moi ton ennemi en incitant Zeus à chercher quelconque mortel pour résoudre le mystère. Je vais à mon tour succomber au poison dont même apollon n'a su prodiguer le remède...*»

....

Narrateur pensif*:*«*C'est une sale journée qui se termine, une de ces journées qui se finissent dans le sang, le mien, au milieu d'un cadavre résultant d'un crime sans honneur. Voilà trois heures que je n'ai plus bougé, plus parlé et je crois que même Zeus m'a à présent abandonné. Cherchait-il réellement un coupable où bien à mieux comprendre l'histoire pour mieux l'effacer de toutes les mémoires*? Soyez m...

Un nuage sorti du ciel et de la nuit tombante, le long des flancs du Mont Olympe ; Caressa Hippolyte, fils de la maison des Kos, et l'emporta sans ne plus jamais laisser de traces.

FIN.
 
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