Les deux questions de psyche

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DeletedUser2461

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Les deux questions de Psyché

AMI LECTEUR, SI TU RECHERCHES ICI UNE HISTOIRE D'AVENTURE, PASSE ALORS TON CHEMIN CAR TU SERAS CERTAINEMENT DECU.


LES DEUX QUESTIONS DE PSYCHÉ

En ce beau jour ensoleillé de printemps, fidèles aux traditions séculaires, toutes les grandes cités alliées s’étaient réunies cette année à Cythère, une île-état gouvernée par le tyran Adorias. Cette assemblée extraordinaire avait pour objectif de renouveler une fois encore les accords mutuels entre empires afin que règne la paix dans cette petite partie du monde de Grepolis. Lors de ces échanges, on délibérait sur la gestion de l’Alliance et sur son épanouissement. On traçait ainsi les grandes lignes politiques qui, tels les fils tirés par les trois Parques, tisseraient le monde à venir.

Il n’était pas rare qu’à l’issue de ce grand rassemblement, les représentants des grandes familles composant l’Alliance, se joignent à des échanges plus familiers et bien plus divertissants. La taverne « Au Cygne d’Aphrodite » était justement un lieu propice à la réflexion... même après avoir levé de nombreuses fois les coupes remplies d’un excellent vin de Cythère.

Entourée d’une foule d’orateurs et aussi d’admirateurs, la grande Psyché aux nombreuses cités, se leva et s’écria :

« Mes amis ! la nuit dernière, Calliope m’a visité et au petit matin, deux questions se sont imposées à moi. Aussi, je désire partager avec vous un moment de réflexion.
Tout d’abord : est-ce que le fait pour un guerrier d’entrer dans une alliance, c’est renoncer à sa liberté ? Ensuite : un fermier, est-il une personne inactive qui s'ignore ?

Psyché indiqua une clepsydre posée dans un coin, comparable à celles utilisées lors des grandes assemblées pour mesurer le temps de parole de chaque orateur.

- Pour corser le tout, je propose que le temps de parole soit le même pour tous, soit un cycle d’écoulement d’eau ».

Adorias se proposa. Il se tourna vers ses amis et prit la parole.

« En ma qualité d’hôte ayant l’honneur d’héberger en ces lieux le grand rassemblement annuel, je me dois d’ouvrir la voie, je commence donc.

Sur un signe d’Adorias, un esclave enclencha la clepsydre.

- On définit communément la liberté par la possibilité d'agir sans contrainte et l'alliance, par un regroupement de guerriers.
Qu'elle soit plus ou moins structurée, l'alliance constitue tout de même un groupe social organisé impliquant des contraintes... Le guerrier qui intègre une alliance, doit-il pour cela renoncer à sa liberté ?

Ma pensée première serait de croire à la perte de liberté dès lors que l'on rejoint une alliance.
Tout membre, acteur de l'alliance qu'il défend, devra œuvrer pour elle. Il agira alors pour le groupe en suivant les directives. Son investissement et son engagement pour la cohérence et la survie du groupe l'emmèneront à agir impérativement. C'est cette nécessité d'actions qui devient finalement une contrainte pour le guerrier membre et cela entrave sa liberté de choix... mais il s'en accommode pour le bien de tous.
Pour le guerrier solitaire, il semblerait qu'il en soit autrement.
J'ai dit plus haut que la liberté était la possibilité d'agir sans contrainte ; on peut alors penser que le fait d'être un guerrier sans alliance amène davantage de liberté car il n'y a pas de règles à respecter, donc pas de contraintes. Il sera seul maître de son destin... Il sera libre.

Libre ? Ne s'agit-il pas là d'une illusion ?

Le guerrier solitaire est exempt de contraintes liées à un groupe social. Il agit seul et de ce fait, protège difficilement ses arrières lorsqu'il fait front à un ennemi. Ce danger permanent, ne risque-t-il pas in fine, de limiter ses actions et de porter ainsi atteinte à sa liberté d'actions ? Une fois acculé dans ses derniers retranchements, écrasé en permanence par la menace d'ennemis puissants, le guerrier qui se croyait libre de toute action, découvre finalement qu'il n'a pas vraiment le choix de ses actions.

Dans les deux cas, la liberté du guerrier est relative au contexte subi et dépend d'un champ d'actions plus ou moins limité. Un guerrier fort sera d'autant plus libre d'agir qu'un guerrier faible.

L'union fait la force si j'en crois les fables d’Ésope... Un guerrier bien entouré par les siens sera donc plus fort qu'un guerrier refermé sur lui-même. Le guerrier membre d'une alliance obéira à des contraintes mais ces contraintes seront minimes comparées à sa liberté d'actions. Certaines de ces actions peuvent aussi ne pas être forcément ressenties comme une contrainte imposée. Ce qui m'amène à dire que la liberté est davantage une idée plutôt qu'un fait.

Tout en discourant, Adorias sortit de la taverne et ramassa un caillou ; il fut suivi par un auditoire curieux qui se demandait ce qu’il ferait bien de ce caillou.

- Regardez cette pierre...

Adorias jeta le caillou au loin.

- Imaginez un instant que cette pierre soit dotée d'une intelligence et qu'elle décide de tomber. Elle dira : je tombe car j'ai décidé de tomber. Mais, a-t-elle vraiment le choix ?
Nous autres, guerriers de Grepolis, ne sommes-nous pas les instruments des dieux qui se jouent de nous ? Je vous pose alors la question : sommes-nous véritablement libres ?

Adorias avait terminé et tout le monde rejoignit la taverne. La clepsydre continuait de s’écouler, preuve qu’il avait respecté le temps imparti. Il interrogea du regard les membres de l’Alliance, attendant une remarque qui ne venait pas.

- Et bien mes amis, seriez-vous tous en accord avec mes propos ? »

Un homme s’avança vers lui et le félicita pour la leçon. Cet homme était magistrat et se nommait Éron.

« Merci cher hôte pour cette démonstration. A moi maintenant d’essayer de répondre à la seconde question de Psyché. Mais avant, je voulais constater le fait que tu orientais le débat sur un autre sujet, celui du libre arbitre.
Cela amène à méditer ; je doute pour ma part que nous soyons réellement libres. Celui qui est véritablement libre de ses actes serait alors l’égal d’un dieu. Et les dieux eux-mêmes ne sont pas tout à fait libres puisqu’il existe une hiérarchie entre eux et que, tout comme nous, ils sont parfois sous l’influence de passions similaires aux nôtres. Les passions sont sources d’actions.
Aussi, pouvons-nous supposer qu’un être passionné agira davantage que celui qui l’est moins et que par conséquent, l’un sera plus actif que l’autre...

Tout ce petit préambule me sert à introduire l’idée qu’il existe des êtres plus actifs que d’autres et donc je peux maintenant tenter de répondre à la seconde question de Psyché : un fermier est-il un inactif qui s'ignore ?

Éron fit un signe à l’esclave ; ce dernier repositionna la clepsydre pour un nouveau cycle.

- Avant toute chose, rappelons que le terme inactif définit le statut d’une personne qui n’agit plus et qui un beau jour, finit par disparaître de Grepolis.
Nous désignons ensuite par le terme de fermier, une personne qui a décidé de s’occuper uniquement de la gestion de ses villes.

Nous savons d’après ce que vient de nous dire notre hôte Adorias, que c’est l’union de guerriers solidaires qui fait la force d’une alliance. Pour cela, chaque guerrier membre de l’alliance s’engage à honorer ses devoirs et à s’investir pour le groupe. Pour renforcer cette cohésion, les guerriers membres échangent sur les forums ; ils optimisent la meilleure stratégie et participent à l’effort de guerre : attaques combinées et synchronisées ainsi que soutiens logistiques et économiques. Parmi ces valeureux combattants, il y en a certainement qui agissent moins que d’autres ; mais cela nous permet-il de les juger inactifs ?

Et à partir de quel moment pouvons-nous qualifier un guerrier d’inactif ?...

La question avait été posée pour la forme ; Éron profitait de ce laps de temps pour se rappeler un vieux chant que lui avait appris son pédagogue originaire de Cythère.

- Adorias, si je me rappelle bien, il existe dans ton royaume, un chant ancien ayant attrait au sujet ; peux-tu en déclamer les vers ?

Adorias se leva et porta sa voix haut et fort.

- Voici le Chant du guerrier fermier ; il s'agit d'un vieux chant appartenant aux Chroniques de Cythère.

Le guerrier, avec toute la fougue de sa jeunesse
Aime combattre, tuer, semer le désespoir
Il accumule titres et renom, moult richesses
Jamais rassasié, il s’enivre de belles victoires
Les dieux sont avec lui et comme la caresse
Qui apaise l’enfant, ils ont béni sa gloire.

Mais après le désir, succède la paresse
La vie se fait paisible ; pas un nuage noir
Le guerrier a rangé son arme et sans tristesse
Contemple son image, sa vie dans un miroir
Il est devenu fermier et avec finesse
Scrute le ciel et l’horizon : il va pleuvoir…​

Éron reprit la parole.

- Ce chant raconte le changement opéré dans le comportement d’un homme : à l’aube de sa jeunesse, il est vaillant et fier ; à la fin de la journée, cet homme devenu fermier est rassasié et scrute l’horizon. Il est là, il est toujours là ; gardien fidèle de nos mers.
Il ne sera pas sur les premières lignes de front. Il ne parlera pas non plus de stratégie avec le haut conseil mais ses villes produiront. Il enverra des forces en soutien à ses frères d’armes ; il leur fournira également des ressources.
Nous ne pouvons pas parler ici d’une réelle inactivité.

La véritable inactivité est l’absence totale d’activité. Lorsqu’il n’y a plus trace de vie dans un corps, on dit que son esprit passe le Styx pour rejoindre Hadès…

Je soulignerais le paradoxe suivant : si le fermier était un inactif, comment s’en rendrait-il compte puisqu’il n’est plus vivant ?

En revanche, si vous désignez d’inactif le guerrier membre subissant une baisse de régime, nous sommes alors tous des inactifs potentiels ! »

La clepsydre s’écoulait toujours ; Éron avait lui aussi fini dans les temps.

Dans la tribune de l'assemblée, on se dévisageait. On se demandait qui parmi tous les membres réunis en cet instant étaient les moins actifs de tous. Certains magistrats baissaient la tête comme si le fait de ne pas avoir participé au dernier rassemblement jetait l'opprobre sur leur maison. Éron rejoignit sa place avec la satisfaction d'avoir pu répondre à la seconde question posée par Psyché.

- Bravo à vous deux ! s’écria Psyché. Je pense que vous vous êtes montrés digne à la fois de Calliope mais aussi d’Athéna pour la sagesse de vos propos.

Des applaudissements appuyés suivirent et au même moment, des esclaves arrivèrent dans la taverne, chargés d’amphores et de mets raffinés. Ils circulaient entre les membres de l’Alliance, remplissant les coupes vides des invités.

Cythère avait pour habitude d’honorer ses invités en leur offrant nourritures terrestres et spirituelles. Ce ne serait pas aujourd’hui qu’elle renierait sa réputation.

Fin
 
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DeletedUser2461

Guest
C'était une idée amusante et originale de Psyché pour rendre en quelque sorte hommage aux bacheliers qui passaient l'épreuve de philosophie ; il s'agissait de répondre à deux de ses questions dont les thèmes avaient attrait à Grepolis.

Si un lecteur a lui aussi une idée à développer concernant les deux sujets, qu'il n'hésite pas à les ajouter ici.
 
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DeletedUser42533

Guest
Bonjour,
la discussion étant inactive depuis plus de 6 Mois, je ferme et j'archive ~
Bonne journée.
Elie
 
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