Ombre Colorée

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Douze petits Dieux

[SPR]L'Olympe, auguste demeure des immortels, sérénissime et apaisée, que nulle tempête ne pouvait atteindre, pas davantage que le regard des simples hommes, était bercée d'un calme de tombeau, telle la mort d'une conversation interrompue par une remarque embarrassante ; un silence lénifiant qui planait dans les couloirs de marbre et dont on sentait presque la consistance, comme une brume dérangeante et nauséeuse.

C'était la quiétude d'un endroit où plus personne n'avait rien à dire, ou bien peut-être, tellement à parler que les mots ne sortaient pas. Un mélange tangible de culpabilité et de terreur flottait dans l'air, une odeur musquée de cerf en rut, auquel s'ajoutait le parfum tenace des soupçons et des coups d'œil suspicieux. Une atmosphère qui aurait mise n'importe qui mal à l'aise et qui ne m'en incommodait que davantage, puisque je n'étais qu'un mortel lancé sur le plateau d'une partie divine qui pouvait au choix me tuer horriblement ou me grandir à jamais.

Seuls s'activaient au sein de la Cité des Dieux, les automates d'Héphaïstos, caricatures d'hommes et de femmes en métal, esclaves ultimes et parfaits forgés pour obéir. Il n'y avait du reste, que onze êtres vivants avec moi. Les Olympiens. Le douzième gisait à quelques mètres de moi, et je n'étais pas pressé de m'approcher de plus près afin de l'examiner. Je savais qu'il était mort, et je savais ce qui l'avait tué ; la lance brisée qui passait par son œil gauche et sortait de l'autre côté de son crâne éclaté était un indice plutôt suffisant, du moins extrêmement convainquant. J'étais désormais censé dire aux autres Dieux parmi les dieux, qui avait pu commettre un acte aussi abominable, et comment une telle chose était-elle possible.

Et c'est sans doute pourquoi je restais là, les bras ballants, tétanisé, la bouche close, considérablement embarrassé, tandis que les immortels me regardaient avec mépris ou bien se jetaient des regards si chargés d'émotions qu'ils chantaient à eux seuls une tragédie grecque. L'ichor avait cessé de couler sur les dalles blanches et formait désormais une marre enchanteresse, pleine de promesses : qui sait quel effet le sang divin pouvait-il bien faire sur un mortel ? Le rendre invincible peut-être ? Et pourtant le liquide vital n'avait point sauvegardé l'éternité de son malheureux propriétaire. Son unique œil restant fixait le sol, grand ouvert tandis que sa bouche béait dans une expression d'étonnement dramatique le plus total.

Trouver le meurtrier n'était pas la partie la plus difficile de ce huis clos : sitôt averti de la catastrophe, Zeus, le père des dieux, avait fait pleuvoir autour de l'Olympe un nuage d'or si dense qu'il en était impénétrable : nulle ne pouvait ni pénétrer, ni s'enfuir, du lieu du crime. Même les plus puissants des Dieux n'étaient pas parvenus à s'éclipser à travers leurs propres failles dans l'espace-temps. Le meurtrier était donc forcément parmi eux. Bizarrement, aucun immortel ne s'interrogea sur ma présence ici. Sur comment j'avais réussi à passer le nuage d'or qu'ils n'avaient pu briser. Leur esprit était probablement trop échauffé pour réfléchir convenablement. Ce qui me convenait tout à fait. Les interroger n'en serait que plus aisé - ou bien pire encore, quoique...

__ Éaque, mon fils, tonna soudain Zeus, mon père, quelque peu impatient et exaspéré par mon inaction. Quels enseignements précieux tires-tu de l'examen si attentif et méticuleux du cadavre, à six pas de celui-ci ? Quelle vue d'ensemble, qui nous échappe, parviens-tu à apprécier ?

L'ironie mordante m'ébranla autant la conscience que la puissance de sa voix. C'est que mon illustre père faisait bien trois ou quatre fois ma taille et me dominait, immense et majestueux, drapé dans une toge blanche et un himation pourpre, ses cheveux et sa barbe bouclés et blancs encadrant son visage sévère et implacable. Je réprimais toute attitude qui m'eut value son animosité, d'autant plus que j'ignorais la pleine étendue de ses intentions. Qu'espérait-il en me demandant - m'ordonnant - d'enquêter sur le meurtre d'Aphrodite ? Cela semblait tellement incongru. Etait-ce une punition ? Cachait-il quelque chose de terrible - de plus terrible encore - et qui m'échappait totalement ?

__ Je t'ai appelé, toi entre tous les mortels, pour nous éclairer sur cette immondice, parce qu'il est de fait connu que tu es droit et juste, et que tous accepteront tes paroles comme étant pleines de sagesse. Je compte sur ton habilité d'esprit pour nous expliquer comment un immortel a pu trouver la mort au sein même de l'Olympe, sans que je ne m'en aperçoive, moi, le roi des dieux.

Il en remettait délibérément une couche, retournait le couteau dans la plaie, élaguait pour moi l'arbre de l'impossible mission qu'il m'avait confiée, et si j'en avais eu l'audace, j'aurais même pu prétendre déceler derrière ses mots un indicible sarcasme qui me vrilla les os.

__ Ô Zeus, souverain de l'Olympe, de tous les dieux et de tous les hommes, commençais-je prudemment, un immortel ne peut mourir, et ton omniscience ne peut être trompée.

Zeus fronça ses divins sourcils et je sus que j'avais mal choisi mes mots - ou plutôt, que mon choix ne lui plaisait pas - quand bien même il ne pouvait me le reprocher puisque j'avais énoncé une stricte vérité.

__ Et ce n'est pas le sublime cadavre d'Aphrodite qui git dans son ichor, une lance traversant son exquis faciès, l'air aussi ahurie qu'un saumon ? grinça élégamment Apollon.

__ Qui a bien pu forger une telle arme déicide ? s'interrogea Athéna tout en regardant délibérément Héphaïstos.

__ Pour vaincre notre immortalité quantique, seule une lame plongée au cœur du feu d'improbabilité céleste réaliserait un tel exploit, commenta sobrement le petit dieu boiteux. Ce genre de truc doit bien trainer quelque part, mais personnellement, je n'en ai donné à personne dernièrement. Ni au cours de la dernière éternité. Il n'y a guère que Thanatos pour en posséder une.

Je vis les dieux frémir à l'évocation de la Mort, qu'eux même craignaient malgré leur immortalité.

__ Cette hypothèse est à écarter, me permis-je de faire remarquer, puisque Thanatos est aux dernières nouvelles toujours prisonnier des chaines de diamant qu'Hercule lui a passé autour du corps, aux portes des enfers.

__ Je confirme, grogna Hadès d'un air mauvais, cette enflure n'en n'a pas bougé, et personne de sain d'esprit ne l'en libérerait. Et quand bien même, il n'aurait aucune raison de s'en prendre à Aphrodite.

__ Et il n'aurait pu fuir avant que sur lui ne s'abatte mon implacable courroux, gronda Zeus en tapant du poing sur l'accoudoir d'or de son trône. J'ai isolé l'Olympe d'un champ de force impénétrable au moment même où j'ai senti ma douce Aphrodite quitter la terre des vivants. Son meurtrier n'a pas eu le temps de disparaitre.

L'évidence implicite s'étala dans la salle parmi les dieux. C'est que le meurtrier, comme je le savais, était encore ici. Je me résolu à m'approcher de l'illustre cadavre et d'en examiner la déicide lance. Elle avait, au premier abord, l'air parfaitement normale. Mais en la fixant quelques instants de plus, on constatait bien vite qu'il émanait d'elle une énergie puissante et dérangeante, quelque chose à même de fracturer l'Univers, de tuer un dieu. Et j'étais en train de tourner le dos à son meurtrier : Zeus, Apollon, Artémis, Héphaïstos, Hadès, Poséidon, Héra, Hermès, Dionysos, Athéna ou encore Arès, cela pouvait être n'importe qui se trouvant dans cette pièce. Soyons fous, il pouvait même y avoir un complice.

Si près d'elle, j'aurais pu trouver la beauté d'Aphrodite confondante, si son expression estomaquée n'était pas apparue aussi ridicule - et comique. J'étudiais son corps, sans le toucher, afin de trouver des indices qui auraient révélé l'identité de l'auteur du crime, tout en sentant sur ma nuque le poids du regard d'êtres dont la puissance dépassait mon entendement. Tous étaient fourbes, vicieux, et laissaient facilement leurs émotions prendre le pas sur la raison pour commettre tous les actes les plus cruels qui pouvaient leur passer par la tête sur le moment. Héra, l'épouse de Zeus, avait bien ravagé mon île natale par la peste, en tuant tous ses habitants ; au seul motif que l'île portait le nom d'une amante de mon père. Héra ou Athéna, jalouses d'Aphrodite, auraient très bien pu vouloir s'en débarrasser. Ou même Héphaïstos, lassé qu'elle ne le trompe avec tous les jolis garçons du coin.

Le dieu boiteux était le meilleur suspect pour cette affaire. Il était le seul à disposer d'armes déicides, le seul à comprendre comment fonctionnaient tous les artéfacts qu'utilisaient les dieux, et il avait conçu tous ces automates qui allaient et venaient en permanence dans l'Olympe. Toute une armée d'esclaves pour effacer les traces de son crime.

D'un autre côté, même si Aphrodite le trompait, elle demeurait la meilleure femme dont il put jamais rêver. Qui voudrait donc d'un misérable rebu divin de son espèce ? Tous les dieux se moquaient de lui. La frustration l'avait-elle conduit à une telle extrémité ? Avachi sur un divan, à siroter de l'ambroisie d'un air nonchalant, il ne semblait pas particulièrement anéanti par le décès de son épouse. Il me lança même un clin d'œil goguenard.

L'enquête se poursuivit. J'interrogeais les Olympiens chacun leur tour, Zeus excepté bien sûr, leur demandant où ils étaient au moment du meurtre, ce qu'ils faisaient, s'ils avaient une raison d'en vouloir à Aphrodite et s'ils connaissaient des dieux qui pouvaient désirer sa mort. Je n'appris pas grand chose, d'autant plus que je n'avais pas les moyens de vérifier leurs dires. Aphrodite était morte dans la salle du trône de l'Olympe, et la seule personne susceptible de s'y trouver à cet instant là était Zeus. Et je savais qu'il ne l'avait pas tué.

Je réfléchissais à comment m'extirper de cet imbroglio divano-politique quand un automate vint m'annoncer la découverte d'un nouveau corps. Un autre dieu avait été tué? Oui, on n'aurait probablement pas fait tout un plat s'il s'était agit d'un automate. Personne ne se souciait de leur sort. S'ils étaient cassés, eh bien, on envoyait le dieu boiteux les réparer.

Hermès était allongé sur son lit aux draps de soie froissés et imbibés d'ichor rouge. Nu, les jambes écartées et les bras pliés en deux positions différentes, j’eus l'occasion de contempler de près les courbes musclées et généreuses d'un être à la beauté... divine. Il avait un trou au niveau de l'omoplate gauche, mais nulle trace de l'arme du crime.

__ Le champ de force n'a pas été levé ? demandais-je à Zeus mon majestueux père quand il fut sur les lieux.

__ Non, gonda t-il avec une fureur contenue.

La mort d'Hermès m'embêtait considérablement. Et elle semblait désarçonner Zeus également, vue la façon dont il contemplait le petit cul rembourré du messager des dieux. Je n'étais pas sûr que ce fut particulièrement parce qu'Hermès était mort, lui personnellement, mais plutôt qu'un autre dieu avait trépassé tout court. Les évènements nous échappaient manifestement à tous les deux. Son regard se remplit d'une colère à même de renverser les océans, et il se mit à me menacer de son doigt énorme.

__ Trouve qui l'a tué, ô mortel, et vite, m'ordonna t-il avant de partir comme une tempête.

Je savais qu'interroger les dieux une fois encore se révèlerait complètement vain. Désormais bourrés de suspicion, ils fourbissaient probablement déjà leurs armes et revêtaient leur armure, bien décidés à ne pas se laisser tuer aussi pitoyablement. Éris, déesse de la discorde, semblait avoir éternué dans le palais des dieux.

Et moi j'étais ici, avec un cadavre de trop. La résolution du premier meurtre n'était pas problématique : je savais depuis le départ qui avait tué Aphrodite, comment et pourquoi. Je faisais simplement semblant de chercher, me laissant le temps de réfléchir à comment présenter la vérité, ou alors un mensonge convainquant qui ne me mette aucun dieu sur le dos. Mais qu'Hermès soit mort était pour le moins inattendu. Par quel moyen allais-je bien pouvoir trouver son assassin avant d'y passer moi même ?

C'est en voyant un automate traverser le couloir que j'eu une idée. Deux, précisément. Je me hâtais de rejoindre l'atelier d'Héphaïstos afin de l'interroger. Je ne lui faisais pas particulièrement confiance, mais de tous les dieux il me semblait le moins à même de comploter. Je le croyais trop intelligent pour ça.

Je m'attendais à trouver une forge pleine de hauts fourneaux et de métal en fusion, mais son atelier était plutôt épuré, à moins que je ne me trouve dans une simple antichambre. Le dieu boiteux ne parut pas surpris de me voir et me gratifia d'une esquisse de sourire, comme s'il avait parié sur ma venue et venait de gagner.

__ Salut à toi, ô dieu forgeron, toi dont l'habilité n'a nulle égale dans l'Univers.

__ Salut à toi, ô mortel, fils de Zeus, répliqua t-il sur un ton léger.

__ Si tu le permets j'aurais des questions à te poser.

__ C'est toujours un grand plaisir pour moi que d'étaler mon savoir à la face des ignorants.

J'ignorais s'il venait de m'insulter, aussi choisis-je de jouer l'indifférent.

__ Premièrement, existe t-il des souvenirs de ce que voient les automates ? Telles les Moires qui tissent l'avenir, les êtres de métal tissent-ils leur vie ? Et secondement, des automates ont ils été détruits dernièrement ?

__ Tu dois tirer ton intelligence d'Égine, ta mère, car Zeus n'est pas aussi malin, ricana Héphaïstos. Oui, tout ce que font les automates est enregistré sur des filaments d'ADN que je peux lire sur mon ordinateur.

Je ne compris strictement rien de ce qu'il venait de dire. Sans doute parlait-il d'artéfacts divins qui m'échappaient totalement. Mais au moins la réponse était-elle positive.

__ Figure toi que je ne t'ai pas attendu pour les regarder. Zeus est peut être omniscient, tant qu'on ne trouble pas toutes les caméras qu'il a mises partout, mais je ne suis pas non plus démuni. Je vois à peu près tout ce qu'il se passe dans l'Olympe.

Je sentis mon visage devenir livide et ma colonne vertébrale frissonner. Mon cœur manqua un battement et j'eu du mal à déglutir. Il remarqua mon malaise et dévoila ses dents d'ivoire.

__ Bizarrement, l'enregistrement de la salle du trône est manquant. Quelqu'un de très précautionneux a délibérément détruit le centre de la mémoire des automates qui y étaient. Impossible de les réparer. Cela répond en partie à ta deuxième question, je crois. Un autre automate a été détruit, dans le voisinage des quartiers d'Hermès, après sa mort. Mais son centre mémoriel est intact. Il semble que les deux crimes soient différents, ne penses-tu pas ?

Son sourire parlait pour lui, il en savait beaucoup plus qu'il ne voulait bien en dire. Et d'ailleurs, comment quelqu'un aurait il pu savoir pour la mémoire des automates ? Il était tout à fait possible qu'il l'ait lui même détruite afin de couvrir les traces du meurtrier d'Aphrodite. Qu'il soit dans le coup ne m'étonnerait pas. Quelque chose ici se tramait, et me dépassait complètement. Je regrettais d'avoir accepté l'offre de Zeus, même si la solitude me pesait et m'avait rendu désespéré.

C'est alors que tout l'Olympe trembla, brièvement, puis qu'un pantin de métal vint nous avertir qu'un troisième dieu était mort. Héphaïstos ne semblait pas surpris, il rigolait même dans sa barbe.

__ C'est ce qui arrive quand on donne des armes à des gamins stupides et prétentieux, l'entendis-je grommeler.

Toute une aile du palais avait été vaporisée. Un combat terrible avait dû s'y dérouler. Les murs de pierre étaient curieusement arrondis, comme s'ils avaient fondu. Des flaques étranges clapotaient encore et je me gardaient bien d'y mettre les pieds. Arès apparemment était mort, et Apollon avait disparu. Soit ils avaient profité du chaos pour s'entretuer, soit le meurtrier d'Hermès s'en servait pour se débarrasser des autres dieux un par un.

Je retournais chez le dieu boiteux. Je sentais qu'il était la clé de tout.

__ Tu sais qui a tué Aphrodite, n'est ce pas ? demandais-je aussitôt à brûle-pourpoint.

__ Comme tu l'as si bien dit tout à l'heure, les dieux sont immortels. On ne peut pas les tuer. Mais on peut faire semblant... Alors si tu me demandes qui a fait semblant de tuer Aphrodite, je te répondrais oui.

Il me fit son sourire carnassier.

__ C'est le même qui fait semblant d'enquêter, et il se trouve devant moi.

Bizarrement, un poids quitta mes épaules. Qu'il le sache et n'ai rien dit plus tôt confirmait qu'il faisait partie intégrante de la machination. Je m'étais mis à le suspecter du meurtre uniquement pour prétendre mener véritablement l'enquête et éventuellement le lui mettre sur le dos. C'était dorénavant exclus. Comme le plan ne fonctionnait pas normalement, il fallait qu'il m'éclaire un peu.

__ Pourquoi Zeus, le père des dieux et mon propre géniteur, m'a t-il demandé de venir pour participer à la simulation de la mort d'Aphrodite ? Il m'a laissé dans l'obscurité à ce sujet là, me promettant seulement qu'il mettrait en retour fin à ma solitude sur l'île déserte d'Égine en transformant ses fourmis en vaillants soldats. Et qu'en est-il d'Aphrodite ? A t-elle vraiment survécu à la lance déicide que Zeus m'a donnée ?

__ Ce n'était qu'une lance ordinaire, ou presque, s'amusa le forgeron. Elle a juste temporairement court-circuité les nanothèques d'Aphrodite de telle sorte qu'elle ne puisse plus bouger. Ce qui expliquait son air béat. Elle voyait et entendait tout ce qui se passait, sans pouvoir réagir. C'est le danger quand on bourre son corps de nanotechnologie pour jouer les déesses immortelles. Elle a passé quelques temps dans une de mes cuves, à se régénérer.

__ Mais pourquoi ?

__ Zeus voulait lui donner une leçon, à cette pouffiasse suffisante. Lui montrer qui était le patron, et au passage, foutre la frousse à tous les autres troufions qui pètent plus haut que leur cul ici. Mais après, tout ne s'est pas passé comme il l'espérait. Que veux-tu, les dieux sont spontanés et imprévisibles, comme des enfants dégénérés et schizophrènes.

__ Et mon rôle dans tout ça ? Pourquoi m'avoir demandé à moi, et à personne d'autre, de participer à cette tromperie et de la mener jusqu'au bout en enquêtant sur mon propre crime, et le sien ?

__ Pour rigoler, sans doute, lâcha Héphaïstos avec nonchalance, comme si ce n'était qu'un détail sans importance. Jouer avec les mortels et les torturer est une activité dont on ne se lasse jamais, nous autres les dieux. Il doit moins rire depuis qu'Aphrodite est sortie de sa cuve plus tôt que prévu, passablement furieuse et a tué Hermès sur un coup de sang. Après tout à dérapé et Arès et Apollon se sont battus. Ils sont tous les trois dans mes cuves, à se soigner. Qu'est ce qui feraient sans moi, je te le demande.

Je manquais de m'effondrer par terre. Tout cela me dépassait complètement, je n'y comprenais absolument rien. Zeus choisit ce moment pour débarquer comme un ouragan, immense, passablement nu et armé d'une lance à l'allure redoutable, déicide ou non.

__ Éaque, qu'est ce que tu fous là ? tempêta t-il en me hurlant dessus. Tout à foiré dans les grandes largeurs. Tu es plus un poids qu'autre chose maintenant, retourne donc d'où tu viens et n'en sors plus.

__ Et ta promesse de rompre ma solitude ? m'écriais-je avant qu'il ne me fasse disparaitre d'un geste négligent.

__ Oh, oui, tiens, voilà tes Myrmidons.

Une bouche de lumière m'aspira et je me retrouva cul par terre, sur ma bien aimée île natale. Entouré d'une bonne centaine d'hommes et de femmes nus, l'air assez surpris d'être là. Malgré toute cette aventure, j'étais heureux. Plus heureux que jamais. J'en pleurais des larmes de joie. Enfin ma solitude était rompue !

Les dieux, visiblement, s'étaient tous remis de leur bataille. Et peu étaient au courant du rôle que j'y avais joué. J'ignorais alors qu'Aphrodite se vengerait plus tard en amenant son protégé Pâris à tuer mon petit-fils Achille lors d'une guerre qui ne serait qu'un théâtre de plus des querelles des Olympiens...[/SPR]
 
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